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Intérêts de classe ou conflits de valeur ?

Le plus ancien monument de Paris n’est pas Français. Il n’est pas carolingien ni plus romain. C’est un bloc de granit de plus de 120 tonnes dont l’âge dépasse les 3 000 ans. Il vient d’un autre continent : l’Afrique. Il fut érigé d’abord dans la capitale de l’Egypte éternelle, Thèbes, sous le règne du pharaon de la 19e dynastie égyptienne Ramsès II, un des plus grands souverains d’un empire légendaire arrivé à son apogée au 13e siècle avant J.-C.





Retrouver la puissance du symbole


Au premier regard, le voyage de l’obélisque de la Concorde entre le temple égyptien de Louxor et Paris n’a aucun sens. Trop d’espace et trop de temps séparent les deux pays et les deux sociétés. Mais en faisant un peu d’histoire afin d’y regarder de plus près, on comprend qu’il a été érigé sous le règne du dernier roi des Français, Louis-Philippe Premier, sur un haut lieu symbolique de la Révolution française. La place où fut guillotiné Louis XVI. Cette place où trônait une statue équestre du Roi Louis XV détruite pendant la Révolution de 1830. Quel est le sens de cet obélisque qui siège au cœur de cette place cardinale de l’Histoire de France ? Pourquoi une telle place pour un monument surgi d’un autre continent, d’une autre civilisation, d’un autre temps ? Son sens, c’est celui d’un message adressé aux Français par son élite politique de l’époque à savoir celui de l’apaisement. C’est une symbolique choisie pour surmonter les querelles de mémoire franco-françaises et les récupérations politiques. C’est peut-être aussi la conséquence des politiques d’image d’une monarchie prudente qui compte ses jours et ne s’affiche plus. C’est sûrement le symbole de la gloire des opérations et de la diplomatie française à l’étranger dans le cadre d’une rivalité avec l’Angleterre en Egypte. C’est enfin une marque de la relation fantasmée entre le pouvoir français et la monarchie d’une des civilisations les plus éminentes et les plus fascinantes dont notre époque ait retrouvé la trace.


Un monument de 120 tonnes de granit et un voyage de sept ans qui représentent parfaitement l’idée que rien qui n’ait vocation à durer, en politique, ne dusse être fait à la légère. Partons donc de ce constat fondamental : la politique est quelque chose de trop grave et de trop sérieux pour être pris à la légère. Avant d’agir, avant de vouloir s’engager, d’être candidat à une quelconque élection, avant même de se former, donc avant même de prendre la décision de s’engager en politique, des questions essentielles doivent être étudiées. De même, la décision politique doit répondre à des déterminants spéciaux. Ce modeste ouvrage proposer pour cela de dresser un panorama des questionnements fondamentaux nécessaires à la réflexion des hommes et des femmes politiques. Avec un travail qui s’articulera sur des analyses étayées d’arguments et de démonstrations fournies par des philosophes et des théoriciens dont les raisonnements nous sont parvenus depuis l’Antiquité jusqu’aux théories de nos contemporains. En nous opposant à l’idée que la politique puisse survivre dans l’opinion et jouer son rôle dans l’Histoire de France si les idées sont confondues les unes avec les autres. Car si les clivages disparaissent, la confusion qui en résulte laisse le terrain à une légèreté incompatible avec la gravité de la politique. Les visions du monde et les paradigmes libéraux d’un côté et ceux des républicanistes de l’autre ne sont pas morts et ne pourront pas s’évanouir dans la nature ni se dissoudre l’un dans l’autre. Les enjeux humains, économiques, sociaux et philosophiques fondamentaux qui en ont fait des conceptions du monde rivales se sont en réalité renforcés avec les siècles.


Une division élite peuple qui s'est muée mais reste prépondérante


Des visions du monde qui ont donné naissance à bien des conflits, des règlements et des institutions qui continuent d’exercer leurs missions au-delà des parcours personnels et de l’évolution dans leur forme et dans le temps des partis politiques. La bipolarité gauche-droite née après la Révolution française de 1789, qui n’est qu’une expression politisée de ces différentes conceptions du monde, n’est donc pas morte après la chute du mur de Berlin et l’effondrement de l’ex-Union soviétique. Ni après les élections présidentielles et législatives de 2017 qui ont vu se dissiper les rêves d’alternance des partis de gauche et de droite traditionnels. Les enjeux sociaux, de classe, de répartition des prérogatives et les paradigmes libéraux ou socialistes sont toujours d’actualité. C’est leur incarnation dans des partis républicains dits « de gouvernement » qui est devenue obsolète. Ils s’expriment simplement sur un autre plan. Les enjeux idéologiques sont tout aussi vivants mais se sont orientés vers des courroies de transmission actuelles comme la question environnementale. Comme la question territoriale à savoir la relation entre la France des métropoles et la France rurale ou « périphérique ». Comme la question autour des croyances religieuses et les conceptions de la vie bonne ou bien encore notre rapport aux populations migrantes en Europe. En somme, les dysfonctionnements de la démocratie contemporaine ont fait glisser les oppositions entre les « intérêts » de classes comme le salaire et les droits vers des conflits de « valeur » qui ont emporté des nations libres dans le populisme. Cette tendance masque mal la prégnance des enjeux sociaux dans notre pays. Au fond, la division « élite – peuple » demeure même avec la supplantation faciale du conflit de classe par le conflit de valeurs dont notre époque est le théâtre, et il faut encore et toujours une idéologie et un projet moral pour fonder un programme d’action politique.



Retrouvez ici l'article Interview avec Karim Bouhassoun parue sur le site InfoCom Besançon

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