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De quelle écologie voulons-nous ?

« Un tien vaut, ce dit-on, mieux que deux tu l’auras, L’un est seur, l’autre ne l’est pas. » Cet aphorisme popularisé par Jean de la Fontaine dans Le Petit Poisson et le Pêcheur illustre parfaitement le dilemme du prisonnier dans lequel est prise l’humanité face aux enjeux du climat et de la préservation des milieux et de la biodiversité.





C’est une faiblesse de l’Homme que de se pencher vers ses préférences à court terme plutôt que de maximiser ses métapréférences. Ces dernières, plus « nobles », sont celles dont le bénéficie individuel et collectif est plus important, mais qui demandent beaucoup d’efforts et qui par cela-même sont repoussées pour des choix de court-terme.


La langue joue parfois des tours. Le mot temps désigne à la fois les conditions météorologiques et la durée. Avec le temps qui passe, le temps change. C’est en observant le ciel que les premières civilisations de Mésopotamie ont divisé le temps annuel. Les mythes et légendes agraires et les rythmes de vie cycliques des sociétés en sont une autre expression. Et cette polysémie du temps souligne bien à quel point les deux concepts – le climat et les ères – sont liés. Tout comme nos décisions d’aujourd’hui et les résultats futurs. Tout comme l’indécision et la timidité de notre génération impacte à chaque seconde les générations futures et l’avenir de notre planète. Qu’on le veuille ou non, vue du ciel, l’histoire industrielle de l’humanité suit son cours. Rien ne se passe malgré les alertes et l’omniprésence de l’environnement dans tous les débats et au bout de chaque plume. Cette tragédie de l’acrasie – du grec ancien ἀκρασία (akrasia) qui signifie « absence de volonté » – peut à elle seule résumer le délire écologique dans lequel est entrée l’humanité tout entière. On estime que 7 millions de morts par an dans le monde sont dues à la pollution de l’air. Elles s’élèveraient à 48 000 par an en France. Si le monde vivait comme les Français, il faudrait 3 planètes à l’humanité. A ce stade, le mode de vie des 7,6 milliards de Terriens consomme 1,6 planète chaque année. C’est trop pour qu’elle se maintienne ou qu’elle se renouvèle. Une planète où la surface de déforestation équivaut à près de 50 millions de terrains de football en 2019. Le niveau moyen de la température globale s’emballe depuis 1990[1].


L’esprit humain est pourtant une source sans limite et il pourra nous permettre de vivre plus nombreux et de prospérer sur notre planète tout en la préservant. Mais pourvu qu’on change de modèle.

Le débat n’est pas dans l’alternative croître ou décroître. Mais d’utiliser la science à bon escient, pour croître bien. C’était déjà dans les écrits du philosophe Platon, lorsque dans ses dialogues avec Socrate, le sophiste Protagoras – célèbre notamment pour sa formule « l’homme est la mesure de toute chose » – répondit qu’il pensait de la science tout ce que Socrate en disait – à savoir que « l’intelligence de l’homme est une ressource qui suffit à tout ». Il ajouta « [qu]’il serait honteux à [lui] plus qu’à tout autre de ne pas reconnaître que la sagesse et la science sont ce qu’il y a de plus fort parmi toutes les choses humaines. »[2]


[1] Source : « Chiffres clés du climat. France, Europe et Monde. » Ministère de la Transition écologique et solidaire, Commissariat général au développement durable, 2019. [2] Platon, Protagoras, Garnier-Flammarion, Paris, 1997.



Retrouvez ici les publications de Karim Bouhassoun sur le site internet de la librairie Charlemagne.

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