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Éduquer à la liberté

La plupart de ce qui est enseigné aujourd’hui sera inutile d’ici la moitié du 21ième siècle, pour ne pas parler de la fin du siècle. Les technologies bouleversent bien plus rapidement nos vies qu’il ne faut de temps pour une génération à se former. Nous avons hérité de la Révolution industrielle d’une théorie de l’éducation spécialisante et linéaire. Il faut paradoxalement regarder en arrière pour se projeter sur la meilleure manière d’anticiper par l’éducation le monde de demain, celui de ce siècle-ci et de ses mutations profondes qui sont en réalité déjà en marche.


Se former tout au long de la vie


Le courant éducationniste du dix-huitième siècle incarné par Helvétius (1661-1727) ou Conéduquer-à-la-libertédorcet (1743-1794) était fondé sur l’utilité de l’éducation pour l’épanouissement de soi. Ce qui compte dans ce modèle, plutôt que de se focaliser sur les éléments fondamentaux d’une « instruction », c’est de s’assurer que nos jeunes se forment à acquérir des tendances, des habitudes, des prédispositions de manière permanente. Nicolas de Condorcet décrivait en 1792 dans un rapport l’importance de donner aux jeunes les moyens d’une éducation permanente (Coutel (Charles), Condorcet, Michalon, collection Le bien commun, Paris, 2009), qui ne s’arrête pas à la sortie de l’école. Apprendre tout au long de la vie grâce à une prédisposition continue à l’adaptation intellectuelle et physique, c’est ce qui confère les moyens de l’agilité professionnelle. Voilà un bel éclairage sur les objectifs in fine que devrait se fixer notre école alors que les bouleversements technologiques, de la biosphère et démographiques rendent bien difficile de prédire ce que nous préserve l’avenir.


Des capacités plutôt que des connaissances


Cette thèse est proche de celle des « capabilités » d’Amartya Sen, qui postule que le plus important est de faire en sorte que l’individu soit libre et qu’il puisse agir. Qu’il s’agisse de sortir de sa condition par une égalité positive, dynamique, ou bien qu’il s’agisse d’une acuité intellectuelle et mentale qui lui permette d’épouser son temps et d’agir par anticipation des risques et opportunités. Les quatre finalités de la formation permanente de Condorcet qui sont la justice sociale, la prise en compte de l’évolution des connaissances, la compensation contre le travail parcellaire et la formation à la citoyenneté sont d’une brulante actualité. L’anticipation de l’évolution des connaissances, sujet qui nous concerne ici, ne doit pas nous inquiéter mais nous affairer. Condorcet a parfaitement décrit le rôle de cette instruction qui « ne devrait pas abandonner les individus au moment où ils sortent des écoles. » Une instruction qui prépare à la vie et qui doit donc « être universelle, c’est-à-dire s’étendre à tous les citoyens. […] Elle doit, dans ses divers degrés, embrasser le système tout entier des connaissances humaines, et assurer aux hommes, dans tous les âges de la vie, la facilité de conserver leurs connaissances et d’en acquérir de nouvelles. » ((TERROT, Noël, Histoire de l'éducation des adultes en France, la part de l'éducation des adultes dans la formation des travailleurs : 1789-1971, L'Harmattan, Paris, 1997).


Ne pas reproduire les erreurs


Les prérequis scolaires et les notions fondamentales d’éducation élémentaire et secondaire ne sont pas en question. Elles sont un prérequis. Mais quand les diplômes ne sont qu’un signal pour le recruteur au détriment de la preuve d’une faculté mentale et le révélateur de prédispositions, la reproduction des erreurs du passé est assurée.




 
 
 

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