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Comment maîtriser l'ère digitale ?

Qui ne s’est pas surpris à rêver d’un futur où la technologie a réponse à tout ? L’intelligence artificielle, le travail à distance, la télémédecine et les progrès en termes d’implants de synthèse sont des avancées indéniables. Mais il faut se garder de se laisser porter par l’euphorie et distinguer l’utile de l’accessoire. Nous devons avoir le courage de porter des jugements de valeur sur les avancées technologiques. En se basant sur la notion d’utilité sociale. Car tous les divertissements ni tous les progrès scientifiques ne sont pas utiles socialement. Permettre à des élèves en difficulté de suivre des cours à distance en visioconférence, c’est une avancée utile. Qui peut affirmer, a contrario, que les réseaux sociaux sont tous utiles ?



Résister aux sirènes du modernisme


Rien ne vaut le présent. Notre seul crédo doit être le bonheur aujourd’hui. Mais le principe de précaution pour le futur ne s’en détache pas. Les deux sont liés, car anticiper les risques et investir pour un monde meilleur, c’est d’abord hic et nunc. Nous ne devons avoir aucune réserve à politiser les questions liées aux nouvelles technologies et aux applications commerciales des innovations scientifiques. Ne sombrons pas dans l’illusion qu’il faut accompagner à tout prix la génération « start up ». Résistons aux sirènes du modernisme et à l’idée selon laquelle il serait possible de résoudre la question de l’emploi et les enjeux sociaux tels que la santé, l’exclusion et la sécurité par la magie du digital. Une partie de la classe politique est engagée sans recul dans le soutien à la « siliconisation du monde » théorisée par Eric Sadin. Attention au conformisme et au suivisme qui mènent au consentement béat. Certes, les métiers du numérique recrutent, la digitalisation des entreprises industrielles promet des gains de productivité pour notre industrie en perte de vitesse depuis plusieurs décennies, la télémédecine fait des prouesses et l’économie de la collaboration bat des records en termes d’utilité et de résultats. Mais le politique doit contrôler l’insinuation du numérique dans tous les domaines de la société, de l’éducation à la santé. Il doit veiller à ce que des pratiques ne s’installent pas par la seule voie royale et irrésistible du capital. Il doit veiller à l’existence d’un outillage philosophique qui face office de garde-fou contre les conséquences induites par la numérisation du monde. En gardant en ligne de mire la constante mesure des conséquences civilisationnelles de l’économie de la donnée.


Bâtissons nos garde-fous


Au fond, ne vaut-il pas mieux vivre mieux plutôt que vivre longtemps ? Si la politique ne se saisit pas de cette question, le marché le fera. Le philosophe de notre temps doit donc prôner la richesse et la densité du moment présent. Un moment que l’économie de la « frontière » menace de monétiser sous couvert de progrès scientifique. Un moment sans cesse bousculé par l’urgence, la mémoire ou l’angoisse du futur et de la mort. Alors que le seul trésor dont nous soyons certains est l’instant. Il faut redonner de la verticalité au temps, un temps tiraillé par son horizontalité, son rapport du passé au futur, ou encore perdu dans le tourbillon de la tâche. Redonner à l’instantané le goût de l’éternité, la sensation du « pour toujours », c’est replacer le temps de vie des Français dans le temps de l’Histoire. C’est donner à l’actualité – au sens du moment présent – tout l’écho du passé et toute la promesse, en gestation, d’un futur meilleur encore si et seulement si la valeur du temps est respectée. C’est la « condensation du temps » du philosophe Gaston Bachelard[1] qui oppose au vertige du temps la philosophie de l’instant : « Toute la force du temps se condense dans l’instant novateur où la vue se dessille, près de la fontaine de Siloë, sous le toucher d’un divin rédempteur qui nous donne d’un même geste la joie et la raison, et le moyen d’être éternel par la vérité et la bonté. »



Retrouvez ici l’article sur l’action de Karim Bouhassoun « faire gagner les jeunes sur le terrain et à l’école » paru dans Mag Centre


[1] Gaston Bachelard, L’Intuition de l’instant, Stock, Paris, 1932

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