Nous vivons dans une société de liberté. La liberté de penser, de dire, de travailler, d’être oisifs, de méditer, de s’entretenir ou non, de s’enrichir ou de n’en avoir cure. La liberté de dessiner les contours d’une carrière politique est primordiale.
Mais cette liberté, comme beaucoup, n’engendre pas ses propres règles du jeu. Les motifs sont aussi variés qu’il y a de candidats. En démocratie, cela se fait souvent au détriment des électeurs, du plus grand nombre, du « bas de l’échelle », et de l’image de la politique en tant que telle. Ne pas se tromper de voie ou corriger la trajectoire est pour beaucoup un choix cornélien tant les pulsions personnelles et collectives sont mêlées. C’est pour toutes ces raisons que la philosophie politique exhorte les politiques et les responsables de toutes sortes afin qu’ils ne confondent pas engagement et profession, même s’ils peuvent être liés.
Prendre le temps du récit
Elle enjoint, en d'autres termes, à prendre conscience de leur responsabilité en prenant le temps du récit, de leur propre récit. Dans la méditation et l’élaboration précise et la construction d’un discours pédagogique basé sur un conte, celui de leur existence propre et de l’univers dans lequel ils évoluent. Un récit, du monde, de l’espace et du temps. Les trois champs d’investigation philosophiques nécessaires à la constitution d’un véritable projet moral qui doit être la première étape et la référence de toute initiative politique.
D’abord un récit de l’état du monde et de la direction qu’on veut faire prendre aux choses, telles qu’elles se présentent à nous, car on ne peut prétendre changer ou accompagner le réel ni donner corps à des idéaux sans véritable cap. Ensuite d’un récit sur l’avenir qui se nourrisse de la perspective du passé et de la relation au futur. Du temps de notre civilisation et des évolutions technologiques dont notre génération est le témoin, et peut être en anticipant ce que les balbutiements des civilisations du 21ième siècle et du futur laisseront, à leur tour, comme trace sur l’humanité et notre planète. Enfin, un récit sur l’espace que les hommes occupent dans leur journée, dans leur semaine, dans leur année, dans leur vie – maison, quartier, environnement, travail, loisirs, ville, pays, continent, centre, périphérie, frontière, horizons, espace au-delà de notre atmosphère.
Espèce, espace et temps. Quelle vision s’en fait-on et quel sens veut-on leur donner ? La vision du monde, la vision du temps et la vision de l’espace, trois prérequis nécessaires que la philosophie a le devoir de disséquer pour éclairer les motifs de l’engagement politique.
Retrouvez ici l'essai de Karim Bouhassoun Que veut la banlieue publié par l'Harmattan sur le site de la librairie Lavoisier